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N​é​ons et N​é​ant

from ATROPISME - INVOCD01 by Le Fragment Ment Quand

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lyrics

Tout est aseptisé.

Tout ce que nous avions à faire,
c'était de réfléchir intensément et d'ouvrir les yeux.

Les murs, les fenêtres, les réverbères, les lignes téléphoniques, les rails et les routes sont parcourus par ces jingles de placement de produit de trente secondes qui ont remplacé les chansons et ce qui étaient des idées par des publicités.

On a suivi les rails et traversé le pays, cherchant des choses intéressantes à voir.
Franchement, quel meilleur moyen de passer son existence sur terre que d'admirer ses merveilles ?
Mais c'est honteux vous savez ? On n'a jamais pensé qu'il y aurait... De l'ordinaire, vous voyez ? Une apathie manifeste, presque agressive, même.

J'hallucine. J'hallucine mon quotidien. Je vois des spectres sur les trottoirs. Des astres affables, des désastres affaiblis. Des microséismes de nos rapports sociaux. L'éclatement minimal de nos cellules. Des vies accélérées qui se frottent sans jamais se toucher. La tête dans les étoiles tombées sur le macadam. Plus rien ne brille dans nos rues. On naît dans des villes de néons et de néant. Une vie de reflet et de lumière noire. Pas de changement de fond.

Mais les choses s'agitent à la surface. Au fond rien ne bouge. On refait les mêmes danses les uns après les autres dans l'amnésie générale. Il n'y a que des souvenirs particuliers. Ensemble on se rappelle le présent et c'est tout.
C'est toujours le même théâtre sur la scène des profondeurs, quand on plonge à l'intérieur, qu'on se perd dans les tréfonds de l'âme. On danse passablement, on titube. Nos largeurs d'esprits nous handicapent, on reste la tête coincée dans le cadre des portes de la perception.

Un jour de plus dans les mines de nos vies,
à creuser des sorties,
des tranchées et des chemins de traverse,
des itinéraires à travers les averses,
passer entre les gouttes qui font déborder la vase
Démarrer à zéro
Chaque matin, s'enliser un peu moins
S'accrocher aux branhes pour ne pas s'enfoncer
Garder la tête à la surface
Ne pas se noyer dans les étendues de fils d'horizon tendus
Suivre la trame de l'existence sans se tromper de ligne
Répondre aux questions confuses que l'on se pose la nuit quand nos idées fusent
et même si l'on s'use à se suspecter de défaillance
Ne pas se répandre en excuses
Face à nos échecs
S'accorder la clémence que nous accordent nos jours d'abondance
Remettre en question la substance des apparences.

Entre les murs se cachent des portes
arpenter nos plaintes
suivre nos fissures et nos failles
entre les mailles des défilés de montagne d'égo
trouver l'issue de secousse
la voie du tremblement de l'être
la réplique sismique qui nous fera trembler de l'intérieur
faire disparaître nos doutes dans des nuages de cendres
en finir avec l'absurdité de nos trêves la nuit
des jours sans rêves où l'on s'ennuie
le temps se venge de nos espoirs
et le matin nous laisse un goût d'encre noire
on garde la tête sur les épaules, polis et fastidieux.

On s'entend mourir de rire en regardant les autres
en regardant les autres c'est nous que nous observons de l'intérieur
on se marre en regardant les autres
crever dans leur bulle
tout ready-made mais déjà ridicule
il est trop tard pour se rhabiller
notre royaume est nu et sans nuances
tout est gris dans nos tunnels de béton
pendant que le soleil se reflète sur des tours de verre à Dubaï
si hautes, si hautes qu'elles gèlent au sommet
et à leurs fondations le froid des hommes
Briser les palais des glaces
avec nos avions de papier
c'est sûr que nous ne sommes pas de taille
Cela prendra du temps mais avec le revers de leur médaille
Nous reconstruirons nos fragiles châteaux de sable
Des vies qui s'effritent
du charbon dans nos bouches d'incendies
Un jour de plus de plus dans les mines de nos vies
à creuser des sorties
à gratter les parois avec un stylo bille

Un autre jour dans les mines de nos vies.
On boit jusqu'à en puer et on fume jusqu'à s'étouffer parce que c'est comme ça qu'on avance.
Passant nos vies à créer des choses et créant des choses pour passer nos vies, parce que sinon, elles n'auraient aucun sens.
Nous sommes damnés si nous attendons nos derniers instants pour nous demander tout ça, putain, c'était pour quoi ?

Fragments : Warren Ellis, Doktor Sleepless + Flo

credits

from ATROPISME - INVOCD01, released May 7, 2020
Spoken word : Flo
Drones : Martial Daunis

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